Le coeur et l'émotivité
"On ne peut parler d'un changement vital véritablement libérateur que si ce changement commence par le cœur"
La gnose originelle égytienne T4-Ch.2
Commentaire du treizième livre d'Hermès Trismégiste à Tat:
Le Noûs universel ou l'Esprit sanctifiant.
Le treizième livre d'Hermès Trismégiste est consacré au mystère du Noûs. Nous avons, nous aussi, souvent parlé de ce mystère, mais nous devons maintenant l'examiner plus précisément. Lorsque nous pensons à l'émotivité, aux émotions humaines, c'est toujours l'état du cœur de l'homme que nous envisageons.
Le cœur de l'homme est un organe merveilleux, de nature septuple, tout comme la tête et le plexus solaire. On peut comparer les sept cavités cérébrales à un chandelier à sept branches, de même le cœur et le plexus solaire.
Le chandelier à sept branches du cœur exerce donc une fonction centrale dans le système vital et fait invariablement appel à la pleine conscience de l'élève tout au long de sa vie. Par le bulbe rachidien d'une part, tous les fluides de conscience se dirigent du sanctuaire de la tête vers le cœur qui les reçoit; d'autre part, le chandelier du plexus solaire, situé sous l'estomac entre le foie et la rate, fait également monter nombre de forces jusqu'au cœur. Ainsi, par le foie et la rate, l'état éthérique et astral de l'homme se transmet au sanctuaire du cœur
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Voyez donc clairement la situation: les trois chandeliers, celui de la tête, celui du cœur et celui du plexus solaire collaborent, et le chandelier du cœur occupe la place centrale. Il est à la fois nourri par les sanctuaires de la tête et du bassin.
C'est en effet le sanctuaire de la tête qui transmet les fluides de conscience du présent, tandis que le sanctuaire du bassin transmet toutes les influences astrales et éthériques du microcosme ayant joué un rôle important dans le passé. De plus, le cœur reçoit aussi, du moins dans de nombreux cas, des rayons émanant directement du cœur central du microcosme, le domaine de la Rose.
Le cœur occupe donc une position centrale dans le système de l'homme. Des influences, impulsions et rayonnements nombreux s'y rencontrent, s'y mêlent et y sont transmutés, constituant I'état émotionnel fondamental, lequel possède à son tour un pouvoir rayonnant.
Ce courant émotif se mêle au sang, au fluide nerveux et au feu du serpent, s'élève ensuite vers le sanctuaire de la tête pour y occuper tous les organes. On peut donc conclure que la qualité, la nature et les particularités de l'état émotionnel proviennent de ce réacteur nucléaire humain qu'est le cœur, et déterminent l'état de vie, le cours de la vie.
L'homme ne peut faire autrement que suivre l'état de son cœur. Et quand, à un moment donne, son état émotionnel, donc le rayonnement du sanctuaire du cœur, est déterminé d'une certaine façon, il en subit obligatoirement les influences et en suit les orientations.
On ne peut parler d'un changement vital véritablement libérateur que si ce changement commence par le cœur
Toutes vos possibilités, toutes vos certitudes intellectuelles ou autres sont donc, sans exception, tributaires de votre émotivité, de sa qualité et de sa sphère d'influence, et lui sont subordonnées. Supposons que, comme c'est généralement le cas, vous ayez reçu une excellente éducation, que vous ayez fréquents les meilleures écoles; vous auriez lieu d'en être reconnaissant car ceci pourrait vous être utile, dans la vie sociale par exemple. Mais si votre émotivité est restée très en retrait de votre éducation, c'est-à-dire, si votre cœur n'a pas reçu, dès la jeunesse, une formation véritablement libératrice psychiquement, cette excellente éducation deviendra bien vite un danger mortel pour vos contemporains, ce qui est aisément démontrable. On ne peut parler d'un changement vital véritablement libérateur que si ce changement commence par le cœur, dans le cœur et avec le cœur.
C'est pourquoi le sanctuaire du cœur doit être soumis le premier à la transfiguration.
L'importance de l'état du cœur est mentionnée d'innombrables fois dans les textes sacrés de tous les temps. L'émotivité de l'homme peut faire de lui un assassin, un possédé ou un simulateur, susciter en lui une souffrance incommensurable ou le précipiter dans l'abîme. Mais les paroles du Sermon sur la Montagne retentissent: «Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.» Et dans le prologue du treizième livre, Hermès parle ainsi de ceux qui ont le cœur pur:
«Le Noûs, o Tat, procède de l'Etre même de Dieu, pour autant que l'on puisse parler de l'Etre de Dieu; quoi qu'il en soit, le Noûs seul se connaît lui-même intégralement. C'est pourquoi le Noûs n'est pas distinct de l'Etre de Dieu; ii émane de cette Source, comme la lumière émane du soleil.
Chez l'homme ce Noûs est bon: c'est pourquoi certains hommes sont des dieux; leur état humain est très proche de l'état divin. Le Bon Démon a donc nommé les dieux, hommes immortels, et les hommes, dieux mortels.
Chez les êtres dépourvus de raison, le Noûs est la nature. Mais là où il y a une âme, il y a aussi le Noûs, de même que partout où il y a vie, il y a une âme. Néanmoins l'âme des êtres dépourvus de raison n'est que vie sans Noûs. Or le Noûs est le bienfaiteur des âmes humaines, il les travaille et les forme en vue du Bien.»
Vue superficiellement, cette conclusion hermétique est quelque peu déconcertante, mais si nous l'éprouvons à la lumière des faits, nous la verrons invariablement confirmée.
Lorsque nous considérons les trois chandeliers qui sont en nous: le chandelier à sept branches du sanctuaire de la tête, celui du plexus solaire et celui du cœur, et que nous nous rendons compte que les trois fois sept lumières se confondent précisément dans le sanctuaire du cœur en un même état émotif, il ne faut certes pas croire que l'état qui en résulte doive automatiquement s'imposer à nous, comme s'il s'agissait d'un processus totalement inéluctable. Il n'en est rien. Non seulement l'inconscient, la voix du passé lointain, joue un rôle dans le cœur, mais aussi la conscience de veille du présent, cette septuple lumière du sanctuaire de la tête, le fluide de conscience qui emplit les sept cavités cérébrales.
Vous pouvez comparer ces sept cavités à des miroirs par lesquels toutes les forces qui collaborent à la conscience de veille se reflètent directement dans le cœur. Donc, lorsque nous parlons de l'état émotionnel qui se forme dans le sanctuaire du cœur, il faut dire également que la conscience du moment présent y joue un rôle extrêmement important. Autrement dit, vous êtes vous-même concerné. Vous recevez donc dans votre cœur toutes les influences, tous les rayonnements, toutes les impulsions opérant en vous dans l'un ou l'autre aspect de votre être. Ce sont autant de voix qui vous parlent. En outre s'y manifeste également, du moins si vous êtes un élève sérieux de la Jeune Gnose, l'attouchement fondamental, la voix du cœur central, la voix de la Rose.
Ainsi, de seconde en seconde, confluent dans votre conscience de veille ordinaire les influences qui de tous cotés convergent vers le cœur. La voix de la Rose vous y parle également, elle peut être déterminante et révélatrice de certaines valeurs. Il est possible aussi d'examiner tout ce qui vient à vous en prenant intérieurement la Rose pour critère. C'est ce qu'on appelle la voix de la conscience.
Ainsi considérez donc votre cœur comme un chantier où vous pouvez exercer consciemment une influence et accomplir un travail extrêmement important. Effectuez donc ce travail avant que les influences, forces et lumières actives ne constituent en vous un état émotionnel irrépressible; car celui-ci une fois formé, vous seriez obligé de vous y conformer.
Avez-vous déjà entendu parler du combat du cœur, de ses luttes? De la tristesse et de la joie du cœur? De sa dureté? Saviez-vous que le combat le plus important, celui qui donne accès au véritable apprentissage, doit être mené dans le cœur? Et que la substance alchimique réellement salvatrice, nécessaire à la réalisation des Noces alchimique de Christian Rose-Croix, doit être préparée dans le cœur?
II n'y eut jamais, dans l'histoire du monde, aucune Ecole spirituelle gnostique qui se laissât prendre à la civilité bourgeoise.
La véritable noblesse est la noblesse du cœur. C'est pourquoi il est dit que Dieu, l'Esprit, sonde le cœur. Cela ne sert donc à rien de bien parler ou de composer son attitude pour faire croire qu'on est le Seigneur lui-même, car l'Esprit sonde le cœur. Ce qui est décisif, c'est l'état émotionnel qui émane de ce cœur et enveloppe l'être entier.
Nous insistons, parce que la plupart des élèves (voyez bien la chose en face) ne connaissent pas encore, en fait, le combat du cœur. Vous connaissez le cœur à peu près uniquement comme l'organe du sentiment.
Vous dites: «Je ressens ceci ou cela.» Mais il est trop tard, c'est déjà l'état émotionnel que vous éprouvez. Le cœur est encore pour vous un organe entièrement automatique, et vous subissez les émotions qui en jaillissent. Vous ne pouvez faire autrement. Et lorsque vous éprouvez les conséquences de cet état émotionnel et vous y opposez, comme vous le faites souvent, vous luttez contre un courant émotif qui a déjà suscité en vous beaucoup de maux, de chagrins et de résistances.
Or cette lutte est une lutte désespérée. Vous ne serez jamais vainqueur. Et vous vous demandez (dans le sanctuaire de la tête, non dans le cœur): «Que dois-je donc faire ou ne pas faire? Comment faut-il m'y prendre pour vaincre ?»Vous combattez dans votre tête jusqu'à épuisement. II est cependant déjà trop tard. Il faut replacer la lutte vers le chantier du cœur, là où l'état émotionnel s'élabore de seconde en seconde. Si vous le faites et triomphez, vous devancez les faits et les événements. Et vous déterminez vous-même le cours de votre destin. Car tout ce qui arrive dans votre vie est dirigé et soutenu par votre état émotionnel; donc si vous réussissez à le modifier, vous prenez en main votre destinée et déterminez vous-même le cours de votre vie. Vous pouvez vraiment inverser le cours de votre destin.
C'est cela la naissance de l'âme. La véritable régénération de l'âme, sa naissance, ne sont pas de vagues considérations sentimentales: «Je ressens cette chose comme ceci ou comme cela»; ces sentiments vagues que nous connaissons tous par moments ne sont rien d'autre qu'un état émotif que nous avons nous-mêmes formé.
C'est pourquoi, nous le répétons: acceptez le combat dans le sanctuaire du cœur, expulsez toutes les forces et tensions qui, éventuellement, obstruent le chemin, et laissez affluer en vous les forces secourables et constructives. Vous formez ainsi vous-même votre état émotionnel et réalisez la naissance de l'âme.
Cet état qui, de seconde en seconde, vous anime, est celui de votre âme. Mais ce n'est pas une valeur statique qu'il faut accepter sans plus. Non, vous pouvez le modifier fondamentalement. Lorsque nous entendons dire: «Oui, je suis ainsi, c'est mon type, mon caractère», nous savons déjà ce qu'il en est. Car si vous êtes réellement élève de la Gnose, et si tout se passe bien, vous changez de jour en jour. Vous changez de type et de caractère.
Dès votre naissance, l'âme suit en vous un certain processus, elle est dotée d'une certaine nature, elle est d'une certaine qualité. Vous le découvrez au fil des années, mais ne vous y résignez pas. Vous pouvez la changer profondément par la reddition de vous-même.
Cela signifie que vous avez à descendre vous-même, avec votre conscience, avec les forces du chandelier du sanctuaire de la tête, dans le sanctuaire du cœur.
Votre état émotionnel, donc l'état de votre âme, est sujet toutes sortes de variations. Vous pouvez le rendre toujours pire et plus funeste. Vous pouvez l'accepter comme automatique.
Mais vous pouvez aussi le préparer consciemment et le rendre apte à recevoir l'Esprit Lui-même.
La plupart des hommes acceptent, sans plus, l'état de leur âme. Et bientôt se forment, au cours des ans, la nature, le caractère, le type: et tous les processus métaboliques y concourent. On atteint ainsi une cristallisation qui rend absolument réfractaire à tout changement.
Oui, on veut bien accepter la Gnose, en plus, comme une sorte de consolation. Quelques-uns parmi vous adoptent ce point de vue. La Gnose vous aide à vivre. Mais ce n'est pas le but de la Gnose! Elle veut vous délivrer de votre misérable état.
Et pour cela il faut descendre dans le sanctuaire de votre cœur et accepter la lutte contre votre émotivité.
Il y a aussi des hommes qui n'acceptent pas les conditions de vie de la masse. Ces êtres recherchent puissance, honneur, célébrité, gloire. Or, dans la nature de la mort, on ne peut atteindre ces choses que par une affirmation de soi poussée à l'extrême, éventuellement en marchant sur le cadavre des autres, ou par toutes sortes de ruses et subterfuges. Il en résulte toujours un état émotionnel bien au-dessous de la moyenne.
On entend dire, par exemple: «Oui, autrefois je tenais compte de considérations éthiques, mais j'en devenais la première victime! C'est pourquoi je me suis endurci le cœur.» Vous connaissez sans doute de telles personnes.
Voyez donc maintenant clairement que ceux qui ne sont pas simplement le jouet de leur émotivité, qui ne veulent ni fermer, ni endurcir leur cœur, mais acceptent la lutte intérieure, peuvent modifier leur état émotionnel, donc changer le cours de leur vie. Le Noûs les renouvelle. Ils acquièrent une tout autre émotivité, une tout autre âme, et la Rose peut se déployer pleinement, de sorte que l'Esprit, Dieu lui-même, a la possibilité de demeurer dans le sanctuaire de leur cœur. Et l'on peut dire avec Hermès: «Le Noûs, o Tat, procède de I'Etre même de Dieu.»