CAMISOLE de FORCE
Jack London
Un homme gît ligoté dans sa camisole de force :
Connaissez-vous le récit de Jack London, « La camisole de force »?
Un homme, flanqué par terre dans sa cellule, gît, cruellement ligoté dans une camisole de force. La vermine le couvre, et sa misère est à peu près totale. Celui qui s'abandonne à une telle misère/ subie dans la chair, meurt dans des tourments infernaux. Or, le héros du récit nie cet état et se tait. Il n'accuse pas ses geôliers; il s'en moque. Il pense à la féerie de l'été dans les bois, au chant des oiseaux, et il veut, sensoriellement, éprouver le parfum des fleurs et le murmure du ruisselet. Et voici que son affaiblissement physique lui est bénéfique ; une division de sa personnalité se produit. Il quitte son corps prisonnier des draps implacables, traverse les murs, et va, chantant, en pleine campagne, là où le soleil• caresse l'univers. – 20 - Pendant que Jes geôliers épient à travers le judas et que le prisonnier est étendu, blême, inanimé, comme mort, il y a là une liberté et, en dépit des circonstances, une joie incomparable. Et c'est dans cette joie qu'il rentre dans son corps, et la forme là, dans la matière et rongée de vermine, fait sienne cette pastorale et chante son allégresse. Il sait qu'il est prisonnier, et pourtant il est libre. Et c'est dans cet état que le trouvent les geôliers abasourdis et perplexes.
Comprenez-vous quelque peu, maintenant, ce que l'Ecole entend par négation ? La négation n'est pas de l'exaltation; elle n'est pas le déni de la réalité dialectique, elle en est le détachement intérieur. Or se détacher ainsi signifie s'élancer vers la miraculeuse liberté. La négation est-elle alors un acte de la volonté, comme le croient beaucoup ? Est-elle un changement de régime alimentaire ou quelque chose de ce genre ? Non, car comprise ainsi, elle serait une culture de la personnalité!
H.N.V. 20, 21