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Matrix : L'héritage gnostique au secours de l'humanité
Par Karma One, 2007.
Après le tumulte médiatique du Da Vinci Code, la publication de L'Évangile de Judas ramène à nouveau la gnose sur le devant de la scène. Car les évangiles apocryphes et les textes gnostiques ne sont pas réservés à quelques exégètes rompus à cette prose ésotérique... Bien au contraire, il est permis à tout esprit curieux et averti de discerner dans ces écrits des premiers siècles du christianisme, certes ardus, des thèmes très polémiques, contemporains, et même brûlants d'actualité sur notre façon de concevoir le monde, sur nos origines, notre évolution, le tragique « malentendu » de la condition humaine, l'évidente nécessité d'une libération...

Mais de qui, de quoi sommes-nous prisonniers ? Et comment tout cela a-t-il commencé ? L'humanité détient-elle la clé de son salut ? Si la pensée gnostique nous fascine tant aujourd'hui, c'est qu'elle réveille dans nos esprits en pleine mutation, une vérité confisquée par deux mille ans de christianisme : nous sommes déjà libres, nous sommes déjà Dieu et depuis toujours... mais nous ne sommes pas seuls ! Ceux que les gnostiques appellent les archontes ne seraient autres que les Annunakis des Sumériens, les extraterrestres hostiles des ufologues, les prédateurs psychiques des chamanes et autres « faux dieux » qui interfèrent dans l'évolution de l'humanité depuis son apparition... Comme on ne se libère que de ce qu'on connaît, la prise de conscience de cette intrusion serait un passage obligé impliquant une véritable révolution spirituelle...
Jusqu'à la découverte en 1945 des célèbres Codex de Nag Hammadi (en Égypte), on ne connaissait la pensée des gnostiques qu'à travers de très rares textes, pour la plupart hostiles, émanant de chasseurs d'hérésie. En effet, les adeptes de la gnose (gnôsis ou connaissance en grec) des premiers siècles de notre ère ont été persécutés et leurs écrits détruits par les tenants de l'orthodoxie chrétienne en raison de leur remise en cause radicale du Nouveau Testament. Selon eux, ce n'est pas Dieu, être parfait et préexistant à toute chose, qui a créé le monde, mais un démiurge, maître des Ténèbres associé au Jéhovah de la Bible, voire au diable. En tant que part de cette création, les humains sont prisonniers de la matière et du corps et la libération de cette condition humaine passe par la découverte de son essence (et non par la grâce de Dieu), découverte fondée sur des connaissances ésotériques.
Depuis Nag Hammadi, une importante littérature s'est développée autour du thème de la gnose, et cet engouement s'est relancé en 2006 avec la publication par le National Geographic de L'Évangile du Judas, manuscrit copte du IIIème siècle découvert en 1978 dans le désert égyptien. La grande nouveauté de cet évangile, c'est le rôle de Judas présenté comme le disciple préféré du Christ et complice de celui-ci pour organiser sa trahison. En livrant le Christ, Judas ne fait qu'accomplir la volonté de ce dernier qui l'a clairement désigné pour cette tâche, nécessaire à l'accomplissement de sa propre mission. Autre « scoop » : la révélation par le Christ de l'existence de deux humanités, dont une serait sous l'emprise des archontes que certains exégètes n'hésitent pas à assimiler aux extraterrestres de l'ufologie contemporaine.
Ainsi, la lecture des textes gnostiques nous propulse hors du paradigme judéo-chrétien et nous autorise à re-poser les questions fondamentales : comment l'humanité est-elle apparue ? Pourquoi s'est-elle organisée en société patriarcale fortement hiérarchisée et régie par des dieux vengeurs et brutaux ? De quoi sommes-nous réellement prisonniers et comment nous libérer ? Pourquoi ce concept de péché originel ? Pourquoi cette apologie de la souffrance ? Qui étaient les Archontes et le démiurge Yahvé ? Qui sont les « faux dieux » ? Peut-on les assimiler, comme l'affirment de nombreux auteurs, à des entités extraterrestres ayant fait intrusion dans la destinée humaine ? À quoi sert le concept de fin des temps établi selon le scénario biblique ? L'échéance 2012, tant évoquée, a-t-elle un lien avec l'Apocalypse ?
L'intox des textes canoniques
À l'opposé, en agissant comme des images inversées, des « négatifs », les textes canoniques, nous renseignent sur les intentions politiques des Pères de l'Église qui ont figé dans le marbre les textes originaux sous la forme des « Saintes Écritures » après maintes manipulations, omissions et censures. Pour les dogmes judéo-chrétiens, l'homme est prisonnier d'une faute commise par son ancêtre, « la faute originelle », et fait donc l'objet d'une damnation qui ne sera levée qu'au jugement dernier. Hors cela, point de salut ! Pour les gnostiques, l'homme est captif de son ignorance. Il n'y a pas eu de « faute », mais une erreur commise par la déesse « Sophia » (sagesse) lors de la création de la Terre et de la lignée humaine, une erreur aux proportions cosmiques qui a eu pour conséquence de couper l'homme de la source créatrice, entravant de ce fait son fonctionnement psychique et le confinant dans la peur et le manque. Cette idée d'ignorance originelle et de séparation est à rapprocher des notions d'illusion et de dualité propres aux philosophies orientales pour lesquelles la libération ne peut en aucun cas s'obtenir par un intermédiaire ou un messie, mais par la« réalisation » ou « illumination » intérieure.
Les textes gnostiques de l'école de Seth (notion que nous expliquerons plus loin) contiennent une mise en garde claire et une opposition nette à des valeurs véhiculées par le christianisme des Pères de l'Église et qui sont centrales dans les religions judéo-chrétiennes : la rédemption ou encore le Salut par la souffrance et l'obéissance stricte et sans réflexion préalable aux prescrits des Écritures et autres Lois divines ! Sans oublier le messianisme, une notion finalement étrange qui contraint l'humanité à une certaine passivité, comme nous l'expliquent de plus en plus d'auteurs. Nous sommes dans l'attente d'un messie qui viendra nous sauver d'un événement traumatique que nous avons de toute évidence bien mérité, nous apprennent les religions du Livre : l'Apocalypse. Cet évènement révèlera le dessous des cartes : il y aura des « gentils » et des « damnés », des élus (144 000 paraît-il) et des méchants. Et par conséquent, un paradis et un enfer (avec en outre un purgatoire, selon la version catholique).
Ce conditionnement au messianisme a certainement formaté la psyché de l'être humain de manière très particulière. C'est ce que pensent les auteurs américains John Lash, mythologue et exégète spécialiste des textes gnostiques, et Paul Von Ward, ex-pasteur, vétéran du Vietnam, ancien diplomate et chercheur en théologie. Pour eux, le but de ce conditionnement était et reste de nature politique : la soumission aux pouvoirs en place par la crainte d'une autorité ultime, invisible et surnaturelle. Paul Von Ward parle même d'un « traumatisme » général et millénaire, « d'une peur existentielle » qui se transmet de manière inconsciente de génération en génération : « La souffrance individuelle se poursuit par le biais d'un complexe d'être déchu (via le concept de péché originel). La vénération que nous vouons à l'image d'un Dieu aux traits humains entrave le sens que l'homme possède de son potentiel. L'abdication de notre responsabilité dans l'avenir de cette planète et celui des générations futures est la conséquence de ce syndrome. Placer notre destinée dans une source de puissance distante et intouchable a permis à la société d'éluder toute responsabilité à l'égard de notre comportement autodestructeur qu'il soit dirigé vers nous-mêmes, les autres ou notre environnement », souligne-t-il.
Effets pervers du messianisme
Pour les gnostiques, une humanité qui suivrait le chemin du messianisme est en danger. Selon John Lash, le fait d'étudier les écrits gnostiques découverts à Nag Hammadi peut amener l'être humain à une réflexion plus que salutaire : il en irait de sa survie ! Car la psyché de l'homme a été conditionnée depuis des millénaires par un système de valeurs où priment le dolorisme et un sentiment de culpabilité perpétuel. On aurait voulu faire de l'homme un esclave soumis que l'on n'aurait pas trouvé mieux, affirment en choeur Lash ou Von Ward. Combien de régimes, de sociétés, de systèmes se sont-ils épanouis grâce à une telle idéologie, se demandent-ils dans leurs ouvrages.
Le gnostique se sent seul responsable de son destin. Il n'entend se libérer que par la connaissance non pas livresque, mais quasi chamanique de son environnement et des entités spirituelles qui le peuplent. D'où le parallélisme étonnant, nous allons le voir, établi par certains auteurs spécialisés dans cette thématique entre les extraterrestres des enlèvements contemporains, les archontes ou les entités parasitaires évoquées par Carlos Castaneda.
Si au IIIème siècle, les Pères de l'Église avaient opté pour la spiritualité gnostique au lieu de la doctrine Paulinienne, si un texte comme L'Évangile de Judas avait été retenu pour faire partie du Nouveau Testament, nous ne serions plus des « chrétiens » priant un homme mort pour la rémission de nos péchés, mais des gnostiques méditatifs à la recherche de la connaissance intérieure de notre fonctionnement spirituel. Nous rendrions hommage à Sophia, à la fois déesse mère de la conscience terrestre et synonyme de notre planète nourricière, Gaïa.
Qui étaient les gnostiques ?
Né à l'est de la Méditerranée, à la fin du 1er siècle de notre ère, le courant gnostique s'épanouit, aux IIème et IIIème siècles, en différents systèmes et autant de sectes, réparties tout autour du Bassin méditerranéen, depuis l'Iran jusqu'en Gaule (...) Inspiré de la philosophie classique et des religions orientales, le gnosticisme a pour terre d'élection l'Égypte d'où sont originaires Carpocrate, Basilide, Isidor, ou encore Valentin, des grandes figures du gnosticisme chrétien. Le gnosticisme tire son nom de la connaissance – gnôsis en grec – que ses adeptes recherchent comme seul moyen de salut. L'enseignement gnostique se caractérise par la transmission d'un récit mythique. Les mythes syro-égyptiens affirment qu'à l'origine est le Plérôme, un univers de perfection, d'unité et de lumière, sur lequel règne le Dieu véritable, entouré d'éons. Mais un des éons engendre le démiurge, créateur de ce monde de division, de changement et de mort. (...)
Ces mythes toujours complexes ont pour but de raconter le destin de l'esprit – pneuma – de l'homme, étincelle de lumière primitivement installée dans le monde céleste, spirituel et lumineux, mais déchue tragiquement sur Terre lors de la création, et enfermée dans un corps sensible. Le Dieu du Plérôme – souvent assimilé au Dieu des Évangiles, par opposition au démiurge de la Genèse et de l'Ancien Testament – a envoyé sur Terre Jésus pour enseigner aux esprits le moyen de se libérer de leur prison de chair. (...) Garant du salut, le cheminement de l'esprit des Ténèbres vers la Lumière apparaît avant tout comme une ascension intérieure vers la perfection spirituelle. Il se caractérise par une fuite du monde et un ensemble de pratiques rituelles et encratiques [chasteté].
Source : Cathares, MSN, 2000.
Matrix ou l'éveil de la matrice par la gnose
Selon Frances Flannery-Daley, professeur en sciences religieuses au Hendrix College (Arkansas) et Rachel Wagner, professeur de religion à l'Oregon State University, la trilogie cinématographique Matrix a directement été inspirée par les traditions gnostiques et bouddhistes. Pour ceux qui n'ont jamais vu cette saga créée par les frères Wachosky, Matrix met en scène un univers complexe dans lequel l'âme de l'homme est prisonnière d'un système de réalité virtuelle qui simule un monde en tout point semblable au nôtre alors que son corps est emprisonné dans une sorte de sarcophage, relié à un système d'échanges de fluides corporels qui le nourrissent. En échange, tous ces êtres humains enfermés dans ces boîtes interconnectées entre elles par un système informatique gigantesque fournissent au super ordinateur et aux robots qui gèrent ce terrifiant réseau dictatorial de l'énergie, une énergie qui provient du fonctionnement cérébrale de ces piles humaines (de fait, des recherches scientifiques ont mis en évidence que l'on pouvait tirer de l'énergie électrique du simple fonctionnement de nos cellules nerveuses).
Notre civilisation n'est plus qu'une terre dévastée et ponctuée par les énormes champs de sarcophages énergétiques dans lesquels est enfermée une humanité dont les âmes croient vivre dans un monde réel alors qu'il ne s'agit que d'une vaste simulation. Certains hommes se sont évadés de cette matrice virtuelle et de ce réseau de sarcophages protégés par des robots du monde « réel » et par des sortes d'agents antiviraux démoniaques (les « agents Smith » du monde virtuel). Ils parcourent les ruines en tout sens, cherchant à éveiller d'autres hommes.
Dans le film, Néo, le héros, pirate informatique dans une vie qu'il croit être réelle est tiré de sa routine par l'un de ces rebelles. Il va se réveiller dans ce cercueil et se rendre compte que sa vie n'était qu'un vaste rêve et que sa seule fonction était d'alimenter la matrice.
Cette thématique de l'Éveil – passant par l'analyse de la réalité et la réalisation de sa nature illusoire – est, typique des traditions gnostiques et bouddhistes. Il s'agit d'être capable de traverser le voile apparent des illusions que nous prenons pour la réalité.
Pour reprendre les propos de Flannery-Daley et Wagner :
« le thème général du film est contenu dans cette courte phrase : "Réveille-toi, Neo". Neo s'y débat en effet avec la question de son emprisonnement dans un monde « matériel », en réalité un programme de simulation par ordinateur créé dans un futur lointain par l'Intelligence Artificielle pour rendre esclave l'humanité. Celle-ci entretient l'ignorance sous la forme d'une perception illusoire connue sous le nom de « la matrice ». Le film forge sa conception ultime du réel notamment par des allusions aux nombreuses traditions religieuses qui avancent l'idée que l'ignorance est le problème fondamental rencontré par l'humanité et que la connaissance ou l'éveil en sont la solution. Le gnosticisme chrétien et le bouddhisme mettent en scène également une sorte de guide qui vient au secours de ceux qui sont encore prisonniers du monde limité de l'illusion, un rédempteur gnostique ou un bodhisattva, qui s'engage volontairement en ce monde pour partager un savoir libérateur, afin de faciliter la délivrance de tous ceux qui sont à même d'entendre. Dans le film, cette figure est représentée par Neo, dont le nom est aussi l'anagramme de "the One" ("L'Élu") ».
Le film fait également écho au langage métaphorique utilisé par les gnostiques. Les textes de Nag Hammadi décrivent le problème fondamental de l'homme en termes métaphoriques d'aveuglement, de sommeil, d'ignorance, de rêves et de ténèbres/nuit, alors que la solution est énoncée en termes de vision, d'éveil, de connaissance (gnose), de sortie des rêves et de lumière/jour.
Voir l'article complet : Réveille-toi ! Le gnosticisme et le bouddhisme dans Matrix
De nous-les-dieux.org.
Source :
http://beaujarret.fiftiz.fr/blog/10199,l-heritage-gnostique-au-secours-de-l-humanite.html
Date de création : 28/09/2009 • 11:07
Dernière modification : 28/09/2009 • 11:08
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