La vie des envoyés de la Rose-Croix d’Or pour notre temps se confond avec l’histoire de l’Ecole spirituelle moderne. Et- il va nous être facile de mettre en relief leur oeuvre, mais difficile de raconter leur vie.
En tout cas une chose est certaine, ils accordaient une énorme importance au travail pour la jeunesse, et en particulier à la création d’écoles au sens scolaire. Ces écoles, les écoles J.V.R., existent maintenant, mais il peut être intéressant de voir à quel point Mr Rijckenborgh voulait cette création. Voici un passage d’une des premières conférences “Aquarius”, à Calw (1964).
“...Ceci impliquera évidemment un enseignement totalement nouveau, totalement autre. Comprenez-vous maintenant l’initiative prise les deux dernières années par la Rose-Croix moderne, afin de fonder une toute autre sorte d’école pour instruire nos enfants?
Comme nous pouvons l’espérer, maintenant que vous voyez clairement comment et par quelle cause l’humanité entière menace de sombrer, donnerez-vous quand même, de bon coeur, vos enfants à des écoles accordées à une telle société? Pour les livrer dès l’âge de six ans, donc sans volonté sous ce rapport, à leur perte, et tout au moins, les conduire plus tard à une grande souffrance?
Nous n’incriminons pas en cela le pouvoir intellectuel de l’homme car ce pouvoir est un privilège divin, un merveilleux privilège. Mais il faut faire de ce privilège un juste emploi! C’est pourquoi une école nouvelle est de nécessité urgente pour nos enfants, à qui vous tenez tant, que vous choyez tellement, ce que nous pouvons à chaque instant constater lorsque vous êtes occupés à jouer et à parler avec eux sur les pelouses de nos centres de conférences. Si vous aimez réellement vos enfants, comprenez ces choses et soutenez notre travail en vue de parvenir à un enseignement totalement nouveau.”
Prenons l’exemple de la télévision, exemple largement utilisé par les fondateurs de l’Ecole Internationale de la Rose-Croix d’Or. Ceci nous permettra d’aborder le problème de l’éducation “de l’intérieur” et de voir que ce que l’on appelle en général éducation est très limité, parcellaire, et par là même dangereux.
Dans les années cinquante, on utilisait, aux fins de vente à outrance, le slogan : “La télévision enrichit la vie familiale”. Et un comique hollandais ripostait du tac au tac :” la télévision appauvrit la vie familiale!” On a pu depuis largement s’apercevoir de la justesse de cette dernière phrase, les postes de télévision poursuivant chaque membre de la cellule familiale jusque dans sa chambre même!
La télévision a maintenant totalement envahi le monde, et vous passez pour un “extraterrestre” si vous n’en possédez pas une, ou plusieurs, chez vous. Nous ne nous attarderons pas sur les influences nocives de cet appareil, tous les spécialistes n’étant pas encore parvenu à un accord entre eux. Mais certains points demeurent :
Enfants et adultes ont souvent tendance à imiter les actes délinquants dont les programmes sont maintenant si pleins. Parents et éducateurs savent que les enfants apprennent pour une part importante par mimétisme. Mais la science officielle ne tient pas compte de ces faits avérés, dont les conséquences se confirment tous les jours. Des voix s’élèvent tous les jours pour dénoncer les méfaits de cette toile d’araignée immense, mais peu en tiennent réellement compte.
Les pionniers du Lectorium Rosicrucianum, Mr Jan van Rijckenborgh et Mme Catharose de Petri, avaient prévu ces choses, dès les années 50 et d’autres encore en matière d’éducation. Ils soulignaient, à l’époque, qu’une toute nouvelle forme d’éducation pouvait neutraliser l’influence de la télévision, qui, selon eux, refroidissait le coeur et tuait l’esprit. Le développement spirituel de plusieurs générations a ainsi été attaqué. Jan van Rijckenborgh, au cours d’une allocution lors de la fondation des Ecoles de la Rose-Croix d’Or, précisait bien : Il faudra lutter pour chaque enfant!
Ainsi les Ecoles fondées à Haarlem et à Hilversum, se trouvaient-elles baignées dans un champ de vie protecteur où les jeunes pouvaient apprendre les leçons de l’existence, départ d’un devenir conscient. Au départ, une trentaine d’élèves et deux enseignants, membres du Lectorium Rosicrucianum, commencèrent le travail.
Dans une lettre à la direction de l’Ecole, Catharose de Petri leur écrit : “Il est important que, très tôt dans la vie de l’enfant, deux états sensoriels se développent. D’une part, une orientation pure sur la future vie mentale qui doit se manifester en tant qu”âme” ou “conscience de l’âme; d’autre part, la manifestation et l’activité de l’atome du coeur, ou atome originel. A partir d’une telle base, d’immenses possibilités peuvent surgir dans l’enfant.”
Cette éducation envisage donc, en vérité pour une fois, de garder ouverts, et au besoin de stimuler, mais sans exagération, ces pouvoirs et- possibilités que sont la pensée et les sentiments vrais, l’intuition, la compréhension, le savoir, la sagesse surtout, et la liberté intérieure. Le programme des études obligatoires repose sur l’enseignement transmis dans l’Ecole Spirituelle de la Rose-Croix d’Or. L’intention n’est certes pas de faire de chaque enfant un élève de l’Ecole Spirituelle. Mais le fait est que l’on tente de garder intacts la réceptivité à l’appel intérieur et le désir de la vie supérieure, tandis que s’épanouit la personnalité et que le moi conscient en prend la direction. La voix de l’âme peut continuer à parler. Ce n’est pas une utopie et beaucoup de jeunes gens passés par l’Ecole Jan van Rijckenborgh encouragent maintenant chez leurs enfants ce désir intérieur de valeurs essentielles, de liberté spirituelle.
“L’école Jan van Rijckenborgh a été pour moi le plus beau moment de ma jeunesse” dit un ancien élève lors d’une réunion.
Tout cela n’est pas une tache facile et cela transparaît dans les questions que les enseignants ont posé à Jan van Rijckenborgh :
“Ne pourriez vous décrire comment vous imaginez un tel enseignement?
Il répondit
“Si vous restez en liaison avec le champ de rayonnement magnétique du Lectorium Rosicrucianum, vous n’envisagerez jamais votre mission comme une tâche ordinaire. Nous ne voulons pas que nos paroles soient transformées en lois ou en schémas culturels. La conséquence en serait la sclérose. Essayez de créer une sphère où les véhicules supérieurs restent toujours actifs, jusqu’au jour où l’enfant peut déterminer sa vie de façon autonome. Utilisez comme fils conducteur les questions fondamentales que posera chaque enfant à un moment donné.
La façon d’envisager les matières à traiter dans une telle école dut être inventée :
A côté des moyens éducatifs classiques ou en tout cas disponibles (le livre “Dit is je werereld, en hollandais” : “Ceci est ton monde”), un matériel spécifique fut mis au point. Au début furent regroupés, à Hilversum, des matières telles que la biologie, l’histoire, la géographie les mathématiques et les langues, sous un titre unique : la biosophie. Il s’agit d’une approche universelle, dont le fondement ésotérique montre d’une façon inégalée les rapports existants entre tous les éléments de l’univers. Sens de l’effort et activité personnelle y sont spontanément de mise. Les enfants de ces écoles développent ici une grande “avance”utilisable dans l’enseignement secondaire.
Ceci nous amène à quelques pistes de réflexion :
Qu’il s’agisse des parents ou des éducateurs, nous sommes surtout au départ confrontés à nous-même, car les questions des jeunes nous interpellent en particulier dans la mesure où nous ne savons pas vraiment y répondre en profondeur. Peut-on parler d’éducation sans connaissance de soi? Ici il n’est pas question de limiter ceci à une connaissance de soi d’ordre psychologique, mais d’une connaissance de soi totale au sens d’une découverte de la dimension microcosmique avec son principe central, et de son instrument, la personnalité.
Tant que nous ne posséderons pas l’entendement de l’essence même de l’homme, impossible d’agir en tant qu’éducateur véritable. Car dans quelle direction guider l’enfant? Notre vision devra devenir, concernant ces choses, pénétrante et claire. Sinon nous ne pourrons dépasser les notions vagues, partielles, et, comme nous le savons, les aveugles ne peuvent guider les aveugles!
Si nous ne connaissons que l’aspect “personnalité” de notre microcosme, nous ne pourrons nous situer que sur ce niveau et manquerons totalement de transmettre tout le côté psychospirituel de celui-ci. Or ce qui est personnel est partiel et la compréhension de ce niveau reste morcelée. La personnalité, imparfaite, commet des erreurs entraînant la souffrance. Il est donc insensé de lutter contre les fautes issues de notre compréhension partielle. Les fragments ne peuvent donner que des fragments. On n’a pas non plus à se demander si l’éducation donnée aux enfants est bonne, s’ils en garderont des traumatismes. Rien n’est bien, tout est bien, il y a ici impossibilité de faire autrement.
Quand nous découvrons ces choses, en faisons l’expérience profonde, notre lucidité nous permet une distance : jusque là, nous ne pouvions faire autrement. L’incertitude commence à se dissiper et la clarté à surgir. Dans cette clarté sont résolues toutes les questions, on ne s’écarte plus des faits concrets, et on ne maquille plus les faits.
Toutes nos questions sur l’éducation ne témoignent elles pas de notre incertitude? Ne reculons nous pas ainsi devant une affirmation lucide? Nous voulons éviter de nous démasquer et travestissons tout cela par de multiples questions, fuyant la vraie connaissance de soi!
Tout le monde du bien et du mal va s’écrouler par la vraie connaissance de soi.Jusque là nous nous empêchions d’avoir une perception claire pour nous mêmes pour nos enfants et nos élèves. Tout cela en passant notre temps à prouver nos bonnes intentions. L’éducation préoccupe les parents et les éducateurs, nous nous sentons appelés à faire quelque chose pour eux, à tout faire pour ceux qui nous sont confiés. Nous devons donc développer une grande clarté.
A la clarté de la vie universelle, nous apprenons comment nous sommes structurés, quelles lois régissent notre domaine de vie, comment nous sommes manipulés et vécus par les forces astales de notre êtreprofond et celles de la terre, renforcées et entretenues inconsciemment par nous-mêmes, quand nous ne leur servons pas d’intermédiaire et ne travaillons pas à leur service.
Quand nous nous rendons compte de toutes ces choses, non parce qu’on nous l’a dit mais parce que nous le ressentons en profondeur, nous voyons que tous les jours, nous donnons de la tête contre ce mur invisible, nous réalisons vraiment que nous ne sommes qu’une parcelle de la totalité, incapable de faire bien ou mal. Le bien provient uniquement de la totalité parce que celle-ci englobe tout et n’exclut rien ni personne. La totalité est l’universel. L’Universel est la Vie et seule la Vie nous dirige.
La personnalité ignore la certitude. Elle reste toujours dans l’expérimental. Mais ces tentatives sont formatrices car faire expériences sur expériences, caractéristique du manque de savoir et de connaissance, fait avancer la recherche et la conscience. C’est pourtant la marque de tout ce qui est temporel, partiel. Aussi longtemps que la forme ne comprend pas qu’elle n’est qu’une partie du tout, elle doit suivre la voie de l’expérimentation, qui est voie de la non-connaissance. Ce chemin conduit à la découverte et est absolument nécessaire pour tous ceux qui manquent de certitude, qui ne savent pas et sont brisés. On ne peut donc éviter le chemin de l’expérimentation. Il est l’unique possibilité de parvenir à la découverte de notre ignorance fondamentale.
Toutes les méthodes proviennent d’un savoir partiel. Et tout cela est à un moment donné accepté ou remplacé, refusé ou non. Tous les problèmes d’éducation se situent au niveau du temporel, de l’expérimental, du partiel. Ils dénotent toujours ignorance et incertitude, et montrent clairement notre manque de clarté. Cette clarté, cette connaissance de soi ne peuvent être acquis de force.